Compris entre l’arrière-pays viennois, la vallée de la Bourbre et la vallée du Liers, les paysages des collines et plateaux des Terres froides sont composés d’un plateau ondulé aussi appelé le pays des collines, à l’est le plateau forestier de Bonnevaux et au sud les plaines alluviales transversales. L’appellation «Terres Froides» est liée au climat froid et rigoureux et aux terres argileuses gorgées d’eau, qui mettent du temps à se réchauffer.
« C’est un pays de collines douces et vallonnées, occupées par un bocage qui n’a laissé aux boisements que les pentes raides et dans lequel, à côté des nombreuses cultures, les pâtures méritent d’être signalées. Ce bocage s’accompagne, dans les fonds de vallées humides, d’étangs et de prairies tourbeuses qui mériteraient d’être préservées mais se voient envahies par la populiculture. »
« Les plaines de la Véga, de la Sévenne et de la Vésonne irriguent le Pays viennois, en lui méritant le qualificatif de « plat pays », du fait de leur profil de vallées glaciaires à fond plat que la trop faible hauteur des collines interfluviales n’arrive pas à concurrencer. »
«La ville de Vienne et son arrière-pays sont situés sur la frange Ouest du vaste delta de matériaux arrachés à la chaîne alpine en surrection au tertiaire. Le substrat morainique affleure sur les versants, ailleurs il est masqué par des recouvrements : complexe morainique et loess éolien.»
« Si la ville est devenue l’une des cités les plus brillantes de l’Isère, c’est en effet largement pour être située au carrefour de la moyenne vallée du Rhône, franchissable en cet endroit, et des voies conduisant au cœur du massif alpin. »

« Installé en Savoie, je suis amené à arpenter les paysages savoyards, et isérois régulièrement, et particulièrement les paysages ruraux et périurbains. Mon activité professionnelle m’a fait découvrir les paysages des Terres froides, à travers des projets d’aménagement à Septème et de planification territoriale à Artas. Habituellement je privilégie le train pour me rendre sur les territoires de projet mais une journée-type de travail dans les Terres froides commence par une arrivée en voiture car il n’y a pas d’accès ferroviaire. Ce qui me frappe alors depuis l’arrivée par l’autoroute A43, est le fort contraste entre les paysages artificialisés sur les franges et les grands paysages agricoles intérieurs.
« Ces paysages compris dans le faisceau de l’autoroute au nord (…) participent à artificialiser les structures paysagères et la géographie. Les paysages des Terres froides sont ceux de l’entre-deux. »
Ces éléments participent à artificialiser les structures paysagères et la géographie. Les paysages des Terres froides sont ceux de l’entre-deux, situés entre les paysages peu aimables des abords de l’autoroute, ceux emblématiques de la vallée du Rhône (à Vienne) et l’entrée dans les massifs pré-alpins et alpins. La perte de repères est à la fois déroutante et plaisante. Les repères montagneux sont alors absents et les lignes d’horizon très souvent boisées ce qui participe à créer un sentiment d’intériorité. Ce ressenti s’explique par le caractère rural des paysages, dans lesquels en termes de bâti, les activités économiques n’ont finalement que peu d’emprise et en parallèle le petit patrimoine architectural est de grande valeur. En Isère, de nombreuses constructions traditionnelles (en galets et en pisé) témoignent d’un savoir-faire vernaculaire. Cependant, dans les secteurs d’habitat, le contraste persiste entre le bâti à valeur patrimoniale, souvent délaissé et les nombreuses maisons pavillonnaires standardisées.
Des maisons à étage en pierre et en pisé sont ainsi mêlées à des pavillons individuels de plein pied en parpaings, qui tendent à banaliser ces paysages urbains..
Pour moi deux valeurs sont fondamentales dans notre métier :
Dans cette typologie de territoire, le rôle du paysagiste-concepteur est alors d’identifier et valoriser les structures paysagères. Par une première étape de diagnostic qui permet de révéler les éléments visibles structurants. Le territoire est alors observé, parcouru pour le comprendre et se projeter. Demain l’atlas des paysages sera ainsi un outil, en préambule de chacune de nos études, une ressource indispensable pour nourrir la lecture objective des territoires et pour démarrer une conversation avec les acteurs locaux. Au cours du diagnostic il m’arrive d’utiliser des cartes postales anciennes. Ces illustrations révèlent les évolutions récentes et fondent le socle commun des valeurs et des connaissances paysagères sur le territoire. Le lien à l’histoire me semble essentiel dans notre métier. car un paysage évolue et se construit au fil des saisons et des années.
« Les paysagistes travaillent dans l’invisible et cela est pour moi un critère de bonne pratique professionnelle. »
Quand arrive le temps des propositions d’aménagement, je tente de rechercher la meilleure intégration, pour intervenir le plus justement possible. Les paysagistes travaillent dans l’invisible et cela est pour moi un critère de bonne pratique professionnelle. Il s’agit d’une recherche de l’intégration qui passe par une logique de matériaux et de filière. Dans le territoire des Terres froides, les matériaux locaux traditionnels semblent être le bois, la pierre et la terre. Le projet d’aménagement nécessite donc de trouver les acteurs et filières locales (carrières et menuiseries) puis de les impliquer dans le projet. Notre rôle de paysagiste dans les espaces urbains est de concevoir des espaces publics, places, rues, jardins, parcs, qui soient partagés. L’enjeu est d’accompagner les élus pour anticiper les changements de pratiques urbaines et sociales et créer des lieux de convivialité, adaptés au réchauffement climatique.
Le défi sur la place de la voiture devient alors essentiel. Dans un territoire comme celui des Terres froides, la voiture est un outil de déplacement indispensable mais celle-ci s’oppose à la qualité de vie des espaces de centralité. Il faut donc questionner sa place sans être radical, en trouvant des compromis, qu’il nous revient alors d’arbitrer. »
« Demain l’atlas des paysages sera ainsi un outil, en préambule de chacune de nos études. »
La lecture des paysages est issue de la conjugaison des thématiques observées dans les chapitres précédents. Mais les paysages sont aussi constitués par le regard que l’on porte sur eux et des images que l’on s’en fait, nourris par un imaginaire social et culturel. On ne pourrait donc pas comprendre leur construction sans tenir compte des fondements culturels qui ont forgé leurs représentations sociales.
Voici quelques faits historiques et culturels locaux qui ont marqué les esprits, ont participé à la représentation sociale des paysages et influencent notre manière de les percevoir.